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L’économie turque et la tentative de coup d’état. La Turquie tente de retourner à la normale rapidement après la tentative de coup d’Etat ayant eu lieu le 15 Juillet. Une question importante est dans toutes les bouches cependant : Quel sera l’impact de ce putsch avorté sur l’économie de la Turquie?

Le Vice-Premier Ministre de l’Economie Turque, Mehmet Simsek s’est prononcé sur L’économie turque et la tentative de coup d’état. L’avenir de l’économie de la Turquie : Il ne prévoit pas de dommages permanents sur l’économie après cette tentative de coup d’Etat. Selon lui, le plus grand risque pour le pays reste les perceptions négatives ainsi que la mauvaise presse faite envers la Turquie dans l’opinion publique occidentale et dans d’autres parties du monde. L’économie turque et la tentative de coup d’état

Al-Monitor : Comment prévoyez-vous les effets à court et à long terme de la tentative de coup d’Etat du 15 juillet 2016 ?

Mehmet Simsek: À court terme, l’impact sera relativement gérable. La possibilité de dommages permanents est très faible. Parce que premièrement, la tentative de coup d’Etat n’a pas duré très longtemps. Il a s’agit d’une nuit, d’un mauvais rêve ou d’un cauchemar. Le traumatisme a été relativement plus important pour ceux qui vivent à Istanbul et Ankara. Cependant, ayant été court et achevé par un échec, il n’aura qu’un impact limité sur l’économie qui va rapidement revenir à la normale. Par conséquent, aucun dommages permanents ne sont prévus.

Al-Monitor : Pensez-vous que les objectifs macro-économiques anticipés en début d’année vont changer après cet événement ?

Simsek: En début d’année, notre prévision pour l’année 2016 était d’une croissance de 4,5%. Les résultats du premier semestre sont parallèles à ces attentes. Nous sommes donc en accord avec nos objectifs.

Les difficultés que nous vivons avec les marchés hors Europe, comme la tendance toujours faible du tourisme ainsi que la lenteur des démarches concernant la remise en place des relations économiques avec la Russie, vont forcément ralentir la croissance de la seconde moitié de l’année.

Par conséquent, en fin d’année, nous pourrons atteindre approximativement 4% de croissance. Le commerce mondial dont la croissance est lente et locale verra sa croissance autour de 3%. Atteindre un taux de croissance de 4% dans la situation mondiale actuelle est pas mal du tout. Dans ce contexte, si nous continuons nos activités de la même manière, nous ne devrions pas ressentir les effets du 15 juillet.

Concernant l’inflation, en juillet, il y a eu une augmentation des ventes dans le tabac et les produits alimentaires non modifiés, comme il était prévu. La banque centrale estime atteindre 7,5% de son objectif d’ici à la fin d’année. Toujours en juillet, notre budget correspond à notre cible et il n’y a aucune hésitation. Ici aussi, nous ne pensons pas qu’il y ait préjudice.

La Turquie a beaucoup de succès dans la création d’emplois. Les données ont récemment annoncé que la Turquie a créé 1 million d’emplois au cours de la dernière année. Cette croissance évolue de manière significative.

Il ne reste que la balance commerciale à analyser. Celle-ci est plus performante que nous l’avions prévu. La baisse du coût des matières premières a réduit les effets négatifs de la baisse du tourisme en Turquie. La balance commerciale turque a donc baissé jusqu’au revenu national, atteignant 3,7%. Bien qu’un préjudice survienne durant le second semestre, nous ne serons pas très loin de nos prévisions de 3,9%. La détérioration sera gérable.

Par conséquent, si l’on regarde dans son ensemble, il n’y a pas de problème majeur dans l’économie turque, même après la tentative de coup d’Etat.

Al-Monitor: Vous n’attendez donc pas de grands effets néfastes du 15 juillet sur l’économie turque. Quel serait le plus grand risque qui irait à l’encontre de votre attente ?

Simsek: En effet, il y a un risque et un seul. L’évaluation de la tentative de coup d’Etat en Occident n’est pas très saine. Les avis sont étonnamment négatifs, alors que nos citoyens ont risqué leur vie pour sauver la démocratie et empêcher le coup. Dans un tel cas, nous nous attendions à un grand soutien de la part de l’Occident qui protège ces valeurs occidentales. Les réactions et de l’Occident sont en quelques sortes importantes pour le monde du travail en Turquie et il nous revient d‘informer. Les dirigeants des sociétés européennes avec lesquelles la Turquie travaille sont des personnes intelligentes, qui ne seront que peu influencés par les écrits bas de gamme sans aucune perspective.

Encore une fois, la perception est assez mauvaise actuellement. Mais la situation de la Turquie est beaucoup mieux que la perception faite. C’est donc à nous de réduire la différence entre la réalité et cette perception erronée.

Al-Monitor: Que comptez-vous faire pour compenser cette différence?

Şimşek: Nous faisons preuve d’une grande mobilisation depuis le premier jour. Nous sommes dans un dialogue et notre porte est ouverte à tout le monde. Des centaines de personnes ont participé aux téléconférences que nous avons organisé avec les investisseurs. Nous avons invité les agences de notation de Moody et Fitch qui ont répondu présentes. Nous avons de bons contacts avec l’extérieur.

Al-Monitor: Comment était leur approche ? Est-il question d’une réduction de la côte de crédit de la Turquie?

Şimşek: Il y a des éléments qui forment notre puissance en Turquie par rapport à d’autres pays en développement, et nous avons aussi des faiblesses. Mais nos faiblesses ne sont pas nouvelles. Par exemple, notre balance commerciale est l’une d’entre elles. Nous acceptons nos déficiences qui ne datent pas d’hier mais qui n’empirent pas. En d’autres termes, notre tendance ne se développe pas.

La préoccupation la plus sérieuse du reste du monde est de savoir si la Turquie va réussir à gérer ses dettes après une telle épreuve. Il n’y a pas d’inquiétude à avoir, l’équilibre financier de la Turquie est solide. Le ratio dette-PIB est de 33% et il continue de baisser.

La réelle préoccupation concerne le secteur privé. Si vous regardez les prêts syndiqués après le 15 Juillet, il n’y a pas de problème particulier. Bien qu’il y en ait quelques-uns, globalement, il n’y a aussi pas de problème concernant les besoins d’émissions d’obligations des sociétés. Je dirais même que ce besoin a augmenté de la part des sociétés. L’émission d’obligations est un indicateur important du marché. Les sociétés turques ont toujours réussi à gérer le recouvrement de leurs dettes même dans les périodes difficiles.

Al-Monitor: Au moment où la Banque centrale américaine (FED) entre dans un processus d’augmentation des taux, les attentes concernant les pays en développement sont négatives. En plus de cela, nous pouvons désormais ajouter les problèmes politiques qui se développent en Turquie ces dernières années. Comment la Turquie pourrait-elle redorer son image ? Quelle pourrait être son histoire pour le futur ?

Şimşek: Selon moi, le plus important est que la Turquie reste en dehors de toute incertitude politique. Nous sommes passés par des élections longues et éprouvantes mais aussi des troubles de perceptions auxquels FETÖ a fortement contribué. Après ces événements, les turcs ont les idées plus claires sur la politique turque. Par exemple, les opérations de 17/25 décembre orchestrés sont considérées comme une tentative de coup d’Etat également. Nous allons aussi nous occuper des événements perturbateurs apparus pendant Gezi Park qui ont aggravés la situation et les problèmes déjà existants. Puis finalement, il faut dire que nous avons vécu une véritable tentative de coup d’Etat. Je ne sais pas ce qui peut arriver de plus grave que cela. Même dans cette situation, les turcs ont réussi à s’unir et évincer le danger.

Nous devons garder des relations solides avec l’Occident. Nous avons empêché un grand désastre d’arriver. Actuellement, cette tentative a apporté de la confusion mais cela ne va pas durer. L’Occident va se rendre compte que la Turquie est fondée sur des bases très solides et que c’est un partenaire en sécurité auquel on peut faire confiance. Ceci est très important selon moi.

Nous essayons aussi de régler les problèmes que nous avons avec les pays qui nous sont géographiquement proches tels que la Russie ou l’Israël par exemple. C’est important de dénouer les problèmes avec les pays de notre zone géographique. Je pense que garder des liens forts avec l’Occident est primordial, et n’est pas en danger aujourd’hui. Il nous reste donc à régler nos problèmes structurels internes au pays. C’est ce qui nous différenciera.

Al-Monitor: Après cette tentative de coup, il semble y avoir une différence significative dans les évaluations de l’opinion publique occidentale concernant la Turquie. Vous avez dit déjà que cela était un problème majeur. La plus grande préoccupation serait que cela endommage la structure démocratique de la Turquie. Que diriez-vous pour contrer ce point de vue ?

Şimşek: En fait, les zones qui ne sont pas touchées par FETÖ ont continué leur vie de manière normal. Pour les gens ordinaires, la vie a repris son cours. La vie continue pour toutes les sections de la société. L’Etat d’urgence n’affecte pas le cours normal de la vie des citoyens.

Malheureusement, l’Occident évalue la situation de manière erronée. Si un événement pareil s’était produit dans un pays d’Occident, quelles auraient été les réactions ? Comment ces pays se seraient-ils débattus face à une telle structure s’étant ancrée à tous les niveaux du système ? Je pose cette question à tous ceux que je rencontre ces temps-ci.

Par exemple, nous avons mentionné l’importance de la justice. Mais de quelle justice parle-t-on lorsqu’une organisation met la main sur votre système et vous dicte sa loi ? Il est inacceptable de recourir à l’usurpation des droits pour un regroupement dans les institutions publiques. Toute la Turquie est soulagée du fait que nous avons évité le pire. Les turcs en parlent tranquillement entre eux dans le pays, mais l’Occident n’a toujours pas réussi à s’en remettre.

Al-Monitor: Suite au 15 juillet, le gouvernement a réagi très rapidement. Toutes les organisations et entreprises supposées reliées à Fethullah ont été prise sous contrôle administratif de l’Etat ou alors leurs dirigeants ont été arrêtés. Certaines sont de très grandes entreprises. Les opérations faites envers ces sociétés portent-elles un risque systémique pour l’économie ?

Şimşek: Ce travail est fait avec précaution, de manière rationnelle. Les dirigeants de ces sociétés ont été retiré de leur fonction et d’autres, responsables du bien être des employés y ont été positionnés. Ils sont là pour que ces sociétés survivent à la situation. Ces sociétés n’ont pas une grande importante dans l’économie et ne constituent pas un risque systémique. D’ici 15-20 jours, des décisions auront été prises concernant FETÖ. Que ce soit pour leurs entreprises comme pour les individuels. Par conséquent, cette incertitude ne va pas durer très longtemps.

La Turquie a été très tenace et efficace face à de nombreux problèmes dans le passé. Par exemple, après l’attaque de Bruxelles, il a fallu des semaines pour revenir à la même capacité de transport aérien. En Turquie, 5 ou 6 heures après une attaque terroriste beaucoup plus dramatique, la capacité de transport était revenue à la normale.

Al-Monitor: Envisagez-vous de prendre des mesures encourageantes pour soutenir l’économie?

Şimşek: Etant donné que les impacts de la tentative de coup d’Etat seront éphémères sur l’économie, nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire de mettre en place des mesures dramatiques. Mais nous prévoirons des petits paramétrages si nécessaires. Nous avons beaucoup de choses à faire concernant la promotion de l’investissement. Nous agissons rapidement sur de nombreuses questions qui existaient déjà et avançons dans notre programme.

Al-Monitor: L’économie turque connait aussi un autre problème depuis quelques temps. En effet, les investissements locaux comme étrangers sont faibles. Pensez-vous que ces derniers événements rendront les investisseurs encore plus nerveux ?

Şimşek: Si nous comparons aux investissements mondiaux, la Turquie n’est pas trop mal placée. Les investissements étrangers représentent 2 à 3% du PIB.

Cette baisse d’investissements qui existe depuis quelques années n’est pas propre à la Turquie mais s’inscrits dans une réelle diminution mondiale de ceux-ci. La raison de cette baisse est bien évidement l’incertitude.

Dans certains secteurs, nous vivons une surcapacité gloable. En fait, dans certains secteurs, il y a des innovations qui amènent de la destruction. Les prix n’augmentent pas. On peut même considérer certains secteurs dans un processus déflationniste. Les marges bénéficiaires sont en déclin. Dans un tel environnement, les investissements resteront malheureusement plutôt faibles.

Pour en revenir à la Turquie, nous avons laissé toute incertitude derrière nous. Les événements comme les élections qui ralentissaient les processus sont désormais terminés et nous avons créé une atmosphère propice aux investissements. En tant que pays en développement, la Turquie propose de belles opportunités d’investissements et a la capacité de se développer. Je ne suis pas un pessimiste, le 15 juillet a été le sommet de l’incertitude pour nous. Nous ne pouvons donc qu’aller mieux à partir de maintenant. Il nous faut faire des efforts spéciaux pour cela.

Al-Monitor: En dernier, je souhaiterais vous interroger sur nos relations avec la Russie. Nous sommes actuellement dans une phase de régularisation de notre plan politique. Quand pensez-vous que notre plan économique redeviendra ce qu’il était ?

Şimşek: Notre président ayant prévu une visite en Russie pour le 24 novembre prochain, prévoit une amélioration avant cette date. Certains secteurs évolueront plus rapidement que d’autres. Par exemple, la remise en place des transports aériens entre nos deux pays était très importante pour nous et elle a été faite rapidement. Nous avons pris des mesures pour éliminer l’anxiété au sujet de la sécurité à cet égard.

Pour lire l’article original, cliquez ici. L’économie turque et la tentative de coup d’état

Traduit par Pelin YILDIZ, pour ERAI TURQUIE

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